21 octobre 2006
L'émétique
L'enfant ne comprend pas.
Cette scène quotidienne, dont il doit surement etre le seul spectateur, il ne la comprend pas.Une curiosité laide et un peu maso le pousse cependant à y assister, chaque après-midi, au sortir de l'école.À sa vue, une sensation entetante le submerge, à la fois faite d'incrédulité enfantine, de voyeurisme malsain, et de peur panique.
Cette sensation, l'enfant n'arrive pas à la définir, pas plus qu'il n'arrive à l'expliquer.
Elle est pourtant devenue nécessaire, et l'enfant veut la vivre encore 10 fois, 100 fois, 1000 fois s'il le faut.La vivre encore et encore jusqu'à arriver à en percer les mystères.
La scène, c'est un peu comme la raie de lumière que laisse filtrer une porte entrebaillée, une vérité implicite, une suggestion, une allusion, un fragment inéxpliqué du monde adulte qui surgit dans son monde d'enfant, s'y dilue et en rend le goût amer.
Et présentement, c'est lui le propriétaire du verre.
L'enfant ne comprend pas.
Tous les jours, à quatre heures et demi, les yeux equarquillés et le ventre noué, il boit ce breuvage empoisonné, que la vie lui aura fait consommer de force et un peu précocemment, et qui est le premier d'une longue série.
La vie n'a jamais de pitié.
Même des yeux vierges et des jeunes âmes immaculées, la vie n'a pas pitié.
L'enfant ne comprend pas.
Tous les jours, à quatre heures et demi, derrière les platanes de la cour de récrée, un monsieur se masturbe en regardant les petits écoliers s'en aller.
"Quels yeux nous faudra t-il et quelle patience, ou quelle cécité plutot pour soudain voir le jour" [Giuseppe Ungaretti]
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